https://pixabay.com/fr/illustrations/grand-fr%c3%a8re-surveillance-s%c3%a9curit%c3%a9-4623073/

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Le ressentiment d’être surveillé en permanence n’est guère endémique à l'époque contemporaine. L’histoire révèle des exemples concrets de ce ressentiment, comme au XVIIe sous le règne de Louis XIV, une police politique développée pour renseigner le roi des opinions politiques qui nourrissent ses sujets. Le « cabinet noir » est ainsi exploité par le ministère de Mazarin entre 1642 et 1661. La célèbre épistolière Madame de Sévigné fut d’ailleurs l'objet de surveillance par l’interception de sa correspondance : « Je conjure ceux qui prennent cette peine de considérer le peu de plaisir qu'ils ont à cette lecture et les chagrins qu'ils nous donnent. Messieurs, du moins, ayez soin de les faire recacheter, pour qu'elles arrivent tôt ou tard ». Toutefois, avec le développement exponentiel des nouvelles technologies, en l'occurrence la vidéosurveillance, de nouvelles inquiétudes apparaissent autour du respect de la vie privée des individus. Il est question plus communément de traçage des données ou informations personnelles, action reprise par le terme anglophone “stalking” au sein des réseaux sociaux. Des innovations s’insinuant progressivement dans notre quotidien, telle que la domotique parfois décriée par ses utilisateurs, en raison de scandales divers dont l’appareil Google Home Mini, accusé d'avoir espionné en permanence et à toute heure ses utilisateurs. Il en ressort de ces incidents, des enjeux de confidentialité des données, ainsi qu’un respect de la vie privée. Or, cela trouve des limites lorsqu’il advient un intérêt général à protéger. Notamment en matière criminelle, la surveillance dite préventive afin de contrôler les agissements des individus notamment sur Internet. À titre d’exemple, la Plateforme nationale des interceptions judiciaires épaule les actions de l’État dans l’analyse du trafic des données. Une prévention théorisée par de nombreux penseurs ou sociologues dont le philosophe Michel Foucault, lequel expose son étude du panoptique dans le milieu carcéral, dans l’ouvrage Surveiller et punir, publié en 1975. Mais encore, il advient de s’interroger si cette surveillance numérique accrue, confirmerait-elle l’hypothèse d’une future société dystopique, induite dans l’ouvrage de George Orwell, 1984, publié en 1949. En somme, l’appréhension de la proximité entre nouvelles technologies et vie privée entraîne de nombreux questionnements, dont celui ci-dessous :  Les nouvelles formes de surveillance engendrent-elles une remise en cause du modèle de société établi ?

Ce probable doute, induit l’étude la finalité du recours à la vidéosurveillance, ainsi que les menaces pouvant imputer l’exercice de droits fondamentaux

CERTES LA VIDÉOSURVEILLANCE DANS L’INTÉRÊT DE LA POPULATION

La bienséance de la population

De nos jours, on est filmé et surveillé en permanence par des technologies de surveillance. Ainsi se sont tous les outils misent à la disposition de la police, et des autorités pour surveiller la population. L’argument de la sécurité et de la protection de la population est utilisé par les gouvernements pour justifier le recours à ces technologies de surveillance. Concrètement, cela peut être des dispositifs comme la reconnaissance faciale, des logiciels comme la police prédictive ; ou bien, des nouveaux types de caméras déployés dans certaines villes comme les vidéos de protection intelligente (détection de comportement suspect, détection de mouvement de foule, etc.). Également des objets, typiquement les drones, une technologie qui s'est développée durant ces dernières années, se répandant sur le territoire français notamment lors du premier confinement. 

Les entreprises qui développent ce type d’outils sont parfois des entreprises connues du grand public comme Thales qui a créé une sorte de conglomérat avec d’autres entreprises. Toutes ses solutions sont développées par des entreprises privées, ce qui vient à déléguer toute une gestion d’une ville et une gestion de la sécurité à ces dernières. Ces entreprises vont être financées par des autorités publiques ou par des agences nationales.

 

De nos jours, la population se tourne vers le gouvernement pour être protégée, les gouvernements ont tendance à utiliser cette peur et ce besoin de sécurité pour étendre leur pouvoir y compris leur pouvoir de surveillance.

Dans le cadre de la pandémie, les technologies numériques peuvent être des outils dans la lutte  du virus, mais ne doivent pas servir de prétexte pour mettre en place une surveillance intrusive et omniprésente. Les gouvernements ont la possibilité d'utiliser des technologies digitales à condition qu’elles ne dérogent pas aux droits fondamentaux. Ainsi, toutes les mesures prises par ces derniers doivent être encadrées par la loi, strictement justifiées et proportionnées, mais aussi limitées dans le temps, notamment dans la santé publique. Les mesures doivent aussi être transparentes et basées sur le consentement des personnes.

     Ainsi, le rôle des parlementaires est de contrôler et de s’assurer que ces mesures prises par nos différents gouvernements n'impactent pas nos droits et libertés. L’exigence d’un certain nombre de garanties à nos gouvernements pour l'application des mesures qu’ils prendraient est nécessaire. 

La sécurité du peuple

La sécurité est un terme vague et non défini jusque dans les années 1990. La sécurité a longtemps été assimilée au droit à la sûreté affirmé par l’assemblée constituante le 26 août 1789 et reprise à l’article 66 de la constitution du 4 octobre 1958. C’est un droit qui se définit comme la « confiance, tranquillité d’esprit qui résulte de l’opinion, bien ou mal fondée, qu’on n’a pas à craindre de danger » (Dictionnaire de l’Académie), c’est donc le sentiment de sécurité. Dans nos textes constitutionnels, la notion de sécurité apparaît à plusieurs reprises, mais sous la forme d’une sécurité économique et sociale.

 

         La définition légale sécurité au sens sécuritaire du terme (une sécurité civile) apparaît dans l’article premier de la loi du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité et la définit comme « un droit fondamental et l’une des conditions de l’exercice des libertés individuelles et collectives. L’État a le devoir d’assurer la sécurité en veillant, sur l’ensemble du territoire de la République, à la défense des institutions et des intérêts nationaux, au respect des lois, au maintien de la paix et de l’ordre public, à la protection des personnes et des biens ». C’est la sécurité au sens de la délinquance, de la violence.

 

Garantir ce droit et donc cette sécurité à l'ensemble de la population permet de déroger aux règles de droit commun et même la sécurité civile et sûreté d’un individu. Cette adaptabilité en vue de l’intérêt général est ancienne, nomment le « cabinet noir » sous l’Ancien Régime ou encore la présence dans nos textes constitutionnels de dispositions permettant la mise en place de régime d’exception pour garantir cette sécurité civile.

Les nouvelles technologies ont permis de sophistiquer et

d’accentuer les pratiques visant à garantir la sécurité civile.

 

L’essor des caméras de vidéosurveillance et de leurs possibilités en est l’exemple type. Il est désormais possible de suivre un individu identifié sur plusieurs caméras sans l’intervention d’un technicien humain. La vidéosurveillance est une technique ancienne qui se dissocie en deux pratiques : la vidéoprojection d’identification permise avec la loi de 1978 Informatique et liberté et la vidéoprotection avec enregistrement simple introduit avec la loi de 1995 précitée.

Cette cybersurveillance se retrouve également avec la technique de l’interception qu’elle soit

administrative ou judiciaire. Il s’agit ici pour les services de police et de renseignement d’intercepter les données de communication de certains internautes (une technique qui est réglementée avec un cadre législatif depuis la loi 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques.

 

Les nouvelles technologies ont permis le contrôle de la population ainsi que son traçage avec la géolocalisation et la reconnaissance faciale. Le développement de la cybersécurité, notamment sur ces deux pans, a fortement été influencé par la crise sanitaire. En effet, pour lutter contre l’épidémie de la covid-19, de nombreux pays ont mis en place de véritable système de traçage de leurs populations grâce aux nouvelles technologies.

 

La cybersécurité a vocation à garantir la sécurité civile du plus grand nombre, cependant l’intérêt général se fait au détriment de la sécurité et de la sûreté individuelle.

LE DANGER DE LA VIDÉOSURVEILLANCE

La vie privée des individus surveillée par l’Etat

            La surveillance permet une certaine protection, néanmoins, cela renvoie à un certain paternalisme de l’État. En surveillant sa population comme il le fait, l’État touche directement au problème de la vie privée de ses citoyens.

            La volonté première est peut-être la protection, la sécurité pour l’intérêt général, mais cela dérive souvent vers une surveillance qui sort des limites de la simple garantie pour la population. Mais il y a une différence entre la surveillance et le traçage. Le renseignement public existe depuis la nuit des temps, dès le XVIIIe siècle, mais l’Internet a permis à l’État une surveillance beaucoup plus poussée et facile. Penser que l’institution d’une surveillance publique relève uniquement des systèmes autoritaires semble logique, pourtant on la retrouve même dans les États considérés comme les plus démocratiques, comme la France. La collecte des métadonnées est pourtant encadrée par la loi pour empêcher toute dérive. Aux États-Unis, la surveillance est poussée à un autre niveau avec des programmes créés pour l’espionnage.

Il va de soi que les pouvoirs publics se servent également de cette surveillance pour espionner les autres États.

 

Le cas de la Chine : le crédit social

La surveillance étatique s’est répandue dans de nombreux pays, à différents stades. Certains d’entre eux optent pour une surveillance assez stricte, par exemple la Chine. En effet, l’Empire du Milieu utilise depuis quelques années le système de crédit social, système de surveillance s'opérant par la reconnaissance faciale.

Chaque citoyen chinois se voit attribuer un nombre de points, si une personne effectue une action qui ne plaît pas au gouvernement chinois, il se voit retirer des points. Mais attention, ces mauvaises actions peuvent être par exemple ne pas rendre visite assez régulièrement à ses aînés. Ce système peut faire penser à l’ouvrage de George Orwell 1984 ou encore à un épisode de la série Black Mirror “Chute Libre”, pourtant il est bien réel et s’étend maintenant à l’international.

Évidemment, l’objectif de cette manœuvre est pour l’État de contrôler ses citoyens, les inciter à agir comme le veut le gouvernement chinois. Pour cela, on va établir un seuil de points à ne pas dérouter sinon, on peut subir une interdiction de se déplacer en train ou en avion, impossibilité de contracter un crédit bancaire. Le stade ultime est la liste noire, le gouvernement va punir en humiliant la personne, en affichant le nom et la photo à la télévision ou dans des lieux très fréquentés.

Il y a donc l’apogée du système de surveillance étatique instauré par l’État avec le crédit social chinois. Ce système n’est pour l’instant que présent dans l’Empire du Milieu.

Amandine BRUFFAERT, Louise RAYNAUD, Toilanti SAÏD, Anne-Sophie SCHLÖGL

BIBLIOGRAPHIE

ARSENE, S., Le système de crédit social en Chine: La discipline et la morale. Réseaux, 225, 2021, p. 55-86.

https://doi.org/10.3917/res.225.0055 

 

FRANCESOIR., (2021) La Chine étend son crédit social à l’international, In FranceSoir, Consulté le 25 novembre 2021, URL https://www.francesoir.fr/politique-monde/la-chine-etend-son-credit-social-linternational

 

LECLERC H., « De la sûreté personnelle au droit à la sécurité », in Journal du droit des jeunes, n°255/ 2006/5, 2006, p. 7-10.

Mme de SÉVIGNÉ., Lettres, éd. des Grands Écrivains, t. II, p. 120. 2. Cité par F. Funck-Brentano, Liselotte, duchesse d'Orléans, mère du Régent, Paris, 1936, p. 124. https://www.lhistoire.fr/cabinet-noir-les-fran%C3%A7ais-sous-surveillance

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